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Le Diable, Probablement…

Quinzaine 1977 | Long métrage | 1h35

« Bresson est « à part » dans ce métier terrible. Il s’exprime cinématographiquement comme un poète par la plume. Vaste est l’obstacle entre sa noblesse, son silence, son sérieux, ses rêves et tout un monde où ils passent pour de l’hésitation et de la manie. » Jean COCTEAU « Il – Robert Bresson – tourne, comme Flaubert écrivait, avec une minutie de puriste, « raturant » ses images comme l’écrivain ses phrases, avec un souci presque maniaque de perfection. D’où, à la fois le nombre limité et la qualité des oeuvres qu’il a réalisées au cours de près de trente ans de carrière. » Unifrance Film, Mai 1971 LE DIABLE, PROBABLEMENT… Quatre adolescents en révolte contre la Société Industrielle et de Consommation, et contre le monde entier, destructeur de la nature et décadent. Leurs problèmes sentimentaux mêlés à leur difficulté d’existence.

Cinéaste(s)

Robert Bresson

Robert Bresson est un cinéaste français né le 25 septembre 1901 à Bromont-Lamothe (Auvergne) et décédé le 18 décembre 1999 à Droue-sur-Drouette (Eure-et-Loir). Son art, dont le caractère spirituel et moral peut sembler influencé par le jansénisme, révèle, par delà un ascétisme apparent, une profonde sensualité. D’abord peintre et photographe, Robert Bresson réalise son premier film en 1934 : “Les Affaires publiques”, film burlesque, qui reste invisible comme c’est le souhait de son auteur (une copie est conservée par la cinémathèque française). Au début de la Seconde Guerre mondiale, il est prisonnier pendant plus d’un an dans un camp allemand. En 1943, il réalise son premier long métrage, “Les Anges du péché”. Puis, c’est une lecture de Jacques le fataliste de Denis Diderot qui lui inspire “Les Dames du Bois de Boulogne” en 1945, avec des dialogues de Jean Cocteau. Déçu dans ses deux premiers long-métrages par le jeu des actrices comme Maria Casarès, il décidera de ne plus faire appel qu’à des acteurs non-professionnels qu’il nommera ses modèles. Le modèle ne doit jamais avoir fait ni théâtre ni cinéma afin de ne pouvoir corriger son interprétation. De (très) nombreuses prises épuisantes permettent à Bresson d’en obtenir l’absolu. Il reniera par la suite assez longtemps “Les Dames du Bois de Boulogne” le trouvant trop “joué”, tout comme Maria Casarès qui ne le trouva justement pas assez. Le film est aussi remarquable par l’emprise du son sur l’image : lorsque Maria Casarès raccroche le téléphone et annonce sa vengeance, le son des claquettes se fait entendre puis l’image d’Agnès (Elina Labourdette), en train de danser apparaît, qui sera le moyen de cette vengeance. Cette technique aujourd’hui courante était à l’époque inédite. On peut résumer l’idée de Bresson en quelques points principaux : * utilisation de modèle, acteur non-professionnel, n’ayant jamais joué. * égalité d’importance entre les images et les sons, travail important du hors-champs à travers la stylisation de ceux-ci. * multiples prises afin d’obtenir l’absolu, le caché des modèles, stylisation de leur voix. * Pas de balayage de la caméra, travellings le plus souvent de trois-quarts, caméra de plus en plus tourné vers les gestes, et les mouvements qui assurent les liens. En 1949, sort “Journal d’un curé de Campagne” adapté du roman éponyme de Bernanos. L’adaptation de ce roman permet à Bresson d’affiner son style : il montre la vie, ou plutôt le chemin de croix, du jeune curé d’Ambricourt, juste sortie du séminaire, atteint d’un cancer de l’estomac dans une paroisse qui lui est hostile. Le film se compose de scènes de la vie quotidienne reliées entre elles par les mots (écrit ou off) du curé sur son journal, modeste cahier d’écolier, qui ouvre le film. On retrouvera ce principe, par la suite dans “Pickpocket” ou dans “Un condamné à mort s’est échappé”. Et, lorsqu’il trouvera refuge chez un curé défroqué, il prononcera ces derniers mots : “Tout est grâce”. Huit ans plus tard, en 1956, Bresson présente à Cannes “Un condamné à mort s’est échappé” ou “Le vent souffle où il veut”, tiré du récit d’André Devigny, et emporte le prix de la mise en scène. Le récit de l’évasion de Fontaine, résistant à Lyon interné au fort de Montluc, y est raconté en détail à travers ses moindres gestes. La précision chirurgicale de la préparation de l’évasion et l’insistance sur les gestes en font un film à part. La Grande Messe en Ut Mineur de Mozart souligne la répétition de la vie quotidienne. Pourtant, Fontaine n’est pas décrit comme un saint, comme dans la plupart des films d’évasion, il est prêt à tuer. De plus, le parcours de Fontaine n’est pas uniquement une évasion sinueuse de nuit dans un fort mais également un itinéraire spirituel pour atteindre la liberté : un pasteur et un prêtre sont également enfermés et l’aident. Le film magnifie en un certain sens la volonté humaine ; c’est un grand succès public et critique. Mais c’est avec “Pickpocket”, en 1958, que Bresson atteint le sommet de son oeuvre. Ce film peut être interprété comme un film sur la rédemption. A travers le “drôle de chemin” de Michel, pickpocket persuadé que certains hommes sont fait pour voler pour le bonheur de l’Humanité, Bresson touche du doigt la grâce. La musique de Lully n’est pas posé sur le film mais en émane. Le texte en pré-générique annonce le film : “Ce film n’est pas du style policier. L’auteur s’efforce d’exprimer par des images et des sons le cauchemar d’un jeune homme poussé par sa faiblesse dans une aventure de vol à la tire pour laquelle il n’était pas fait. Seulement cette aventure par des chemins étranges réunira deux êtres qui sans elle ne se seraient jamais connus.” En 1960, Bresson signe un film sobre et austère, “Procès de Jeanne d’Arc”. L’oeuvre est inspirée des minutes du procès ainsi que du procès de révision survenu 25 ans plus tard. Le film est très rigoureux au niveau de l’approche historique et ne raconte que le procès et la mort de Jeanne. En 1966, il signe son film le plus complexe dramatiquement, “Au hasard Balthazar”. A travers vie et mort de l’âne Balthazar, Bresson réalise un film sur le mal et la vie. Balthazar fait référence une fois de plus à la Bible et à l’hymne des comtes de Baux, qui se disaient descendants du mage Balthazar. En 1967, il réalise “Mouchette” considéré par Claude Mauriac comme son chef d’oeuvre. C’est une fois de plus une adaptation de Bernanos. On peut retenir de ce film la magnifique scène de la fête foraine, présentant, en auto-tamponneuses, une des plus belles et originales scènes de drague, sur la musique de Jean Wiener. Ou encore le suicide de Mouchette dans la rivière, dont la robe, offerte par une vieille commère auparavant, reste accrochée au branchage, tandis que l’eau s’agite étrangement (effet de montage avant-arrière) refermant sur la musique de Monteverdi son tombeau… En 1969, Bresson signe son premier film en couleur, “Une femme douce”, dont la photo est assurée par Ghislain Cloquet, qui avait réalisé les très beaux noir-et-blancs de “Mouchette” et “Au Hasard Balthazar”. Le film s’ouvre sur le suicide d’une jeune femme dont le châle vole au dessus de la rue. Son mari se remémore au travers un long flashback sa rencontre avec elle et leur vie commune. L’adaptation de cette nouvelle de Dostoievski est l’occasion pour Bresson de décrire la vie de la (très) petite bourgeoisie parisienne. Il dénonce le cinéma (qu’il oppose à son art, le cinématographe) lorsque le jeune couple se rend dans une salle obscure pour voir “Benjamin ou les mémoires d’un puceau” de Michel Deville ou encore lors d’une représentation de “Hamlet” de Shakespeare, mal joué apprendra-t-on par la suite. Dominique Sanda interprète son premier rôle dans ce film. C’est, avec Anne Wiazemsky, l’une des rares modèles de Bresson à avoir fait carrière par la suite en tant qu’actrice. En 1971, il réalise une nouvelle adaptation de plusieurs nouvelles de Dostoievski, “Quatre Nuits d’un rêveur”. En 1974, il réalise “Lancelot du Lac”, film au budget assez important sur le retour de Lancelot à la cour du roi Arthur après l’échec de la quête du Graal. On y trouve le futur producteur Humbert Balsan dans le rôle de Gauvain. Bresson filme en essayant d’éviter la fausse reconstitution historique. Il montre la vie comme s’il filmait celle d’aujourd’hui et sans magnifier les décors et costumes. En 1975, il publie “Notes sur le cinématographe” (NRF), recueil d’aphorismes dans lequel il défend sa vision du cinématographe qu’il distingue du cinéma. Pour lui, le cinéma n’est qu’un théâtre filmé, tandis que le cinématographe invente une écriture nouvelle avec des images en mouvement et des sons mises en relation par le montage. En 1978, il offre une image assez noire de la jeunesse avec “Le Diable, Probablement”. Son dernier film, “L’Argent”, est une adaptation d’une nouvelle de Tolstoï, “Le faux Coupon”. Parce qu’un riche fils de famille donne un faux billet de 500 francs à un photographe, un employé rentre dans l’engrenage de la prison, du vol, de la déchéance, et du meurtre. Ce beau film fut sifflé à Cannes où il obtint le Grand Prix en 1983. La diction épurée des modèles ainsi que les cadrages rigoureux mais généreux surprirent. Il ne pourra mettre en place son ultime projet, “La Génèse”, tiré de la Bible. En 1995, l’ensemble de son oeuvre cinématographique est distinguée par le Prix René Clair.

Fiche artistique & technique

Avec
Antoine Monnier
Henri de Maublanc
Laetitia Carcano
Tina Irissari

Image
Pasqualino de Santis

Montage
Germaine Lamy

Musique
Philippe Sarde

Production : SUNCHILD PRODUCTIONS (S. Tchalgadjieff) SOCIÉTÉ FRANçAISE DE PRODUCTION GMF PRODUCTIONS (Michel Chanderli)

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